Menu
Selon les statistiques nationales, 1% de la population serait concernée par un trouble du spectre de l’autisme. Soit, potentiellement, quelque 1500 personnes en Ariège. Un département où les parents ont fait bouger les lignes en créant un service d’accompagnement à domicile. En favorisant ainsi la quête de l’autonomie de leurs proches, ils espèrent passer à la deuxième étape du projet: créer des logements inclusifs partagés. Notre dossier.
Le ton est hésitant mais le sourire timide toujours bienveillant. Lorsqu’il est question d’Audrey, le visage de Mathis s’éclaire. «Elle est sympa.» Et ça tombe bien, c’est justement Audrey qu’Ariège assistance a envoyée, ce jour-là, pour l’accompagner dans sa lente quête de l’autonomie. Son prénom figure donc en tête du grand tableau blanc accroché au mur du bureau de Mathis. Juste en dessous, Corinne a écrit «Venue de la journaliste» pour préparer son fils à un événement inhabituel dans son quotidien. Mais ce que ce beau jeune homme âgé de 20 ans attend surtout, c’est ce qui vient après, «devoirs», bien plus encore que «jeux» et «sport» écrits ensuite dans la liste des tâches de la matinée. «Je préfère faire les devoirs (1)», parvient à lâcher Mathis au prix d’un effort à peine perceptible. Corinne sent poindre la nostalgie des années collège, qu’il a dû quitter à 17 ans. Malheureusement, son trouble du spectre de l’autisme ne lui a pas permis d’aller plus loin avec l’Education nationale. Et les copains lui manquent. Mais depuis deux ans, sa mère n’est plus seule à l’aider.
«J’ai pu reprendre un emploi grâce à Ariège assistance qui a créé un service dédié en 2019. Aujourd’hui, Mathis a quatre accompagnatrices qui se relaient auprès de lui matin et après-midi, Sonia, Elodie, Aline, et Audrey donc.»
Le jour et la nuit par rapport aux années qui ont suivi l’annonce du diagnostic. «On a beaucoup tendance à se débrouiller seul au début. On ne pense pas forcément à aller frapper à la porte d’une association. Et puis d’ailleurs, avant la création d’Autisme Ariège en 2009, il n’y avait aucune association de parents d’enfants TSA. On était vraiment seuls», soupire Corinne. Finalement, comme dans toutes les familles, les enfants ont grandi et Autisme Ariège pareil, au point d’enfanter Sated 09, un service d’accompagnement pour les personnes avec troubles envahissants du développement. Les bénéficiaires cette fois, des adultes avec autisme pour lesquels rien n’était prévu jusque-là. Mais il fallait des professionnels formés pour les aider. Cette nouvelle association de parents a donc sollicité Ariège assistance, qui a dit «banco».
«Ils accompagnent les personnes avec TSA dans le développement de leur autonomie que ce soit à domicile ou pour faire les courses, ce qui permet de proposer du répit aux familles.»
Au chapitre des avancées pour Mathis, il peut rester seul une heure par jour, et mange sans l’aide de personne entre deux manches de jeux vidéo, en attendant le retour de l’accompagnatrice. Il maîtrise aussi les recettes du gâteau au chocolat (il adore), des pâtes à la sauce bolognaise… et se débrouille de mieux en mieux avec le téléphone, ce qui n’était pas une mince affaire il n’y a pas si longtemps.
Mathis avance donc à son rythme, avec un secret espoir pour sa mère, qu’il ait un jour accès à un logement autonome. L’accompagner dans ce nouveau cadre ne serait pas pour déplaire à Audrey. «J’ai choisi ce métier pour me sentir utile. Et en même temps, c’est un métier où on apprend à se contenter de peu. Vous savez, quand je vois Mathis prendre l’initiative de mettre le sel et le poivre tout seul dans les pâtes, ce n’est pas grand-chose pour nous, mais c’est énorme pour lui.» Le sourire de Mathis en dit long.
(1) Il est très fort en mots croisés.
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) regroupe un ensemble de troubles neurobiologiques qui agissent sur le développement des personnes dites « autistes », terme que les parents apprécient peu. Ils préfèrent parler de « personnes avec autisme » ou de « personnes avec un TSA », notion qui témoigne des avancées scientifiques faites sur le sujet et qui permettent de sortir ce handicap du champ de la psychiatrie dans lequel il a trop longtemps été enfermé depuis Bruno Bettelheim et la fin des années 60.
Très rapidement, en créant Sated 09 en 2017, les parents venus pour la plupart d’Autisme Ariège, ont eu un objectif: travailler à la création de logements inclusifs partagés pour des adultes avec TSA proches de l’autonomie. Un projet aujourd’hui bien ficelé grâce au sérieux des étapes précédentes dont Monique Arnu, la secrétaire, explique la genèse. Objectif prioritaire maintenant: trouver un terrain entre Foix et Pamiers.
Non, effectivement, et c’est pourquoi, dès la création de Sated 09 en 2017, nous avons décidé d’avancer par étapes. Nous avons créé un organisme de formation, de façon à former les gens d’Ariège assistance chargés de l’accompagnement à domicile, mais aussi à apporter des connaissances aux professionnels. Autisme Ariège et Autisme sans frontière nous aident par ailleurs à financer des formations pour les aidants. Une est d’ailleurs en cours dans les locaux de l’ITEP à la Tour du Crieu, l’Institut thérapeutique éducatif et pédagogique d’Ariège qui nous prête gracieusement des locaux. Une autre formation pour les aidants est prévue dans le 2e semestre.
Exactement. Certaines étaient plus avancées que d’autres dans leur cheminement vers l’autonomie. Donc, on voulait les aider à aller plus loin. À cet égard, on a aussi participé en tant qu’association marraine à la création d’un groupe d’entraide mutuelle. Il s’agit de jeunes adultes qui se sont regroupés pour créer une association qui s’appelle «Les Bulles bleues». Autisme Ariège en est l’association gestionnaire et Sated la marraine. On a répondu à un appel à projet de façon à avoir un financement pour une animatrice qui viendrait collaborer avec ces jeunes pour coordonner leurs desiderata en matière d’animations. C’est en cours.
Ces bâtiments doivent se trouver dans une ville moyenne avec tout à proximité, que ce soit les transports, les commodités, les administrations… Donc, on a rencontré tout un tas de personnes entre Foix et Pamiers, sur tous les villages. Et à ce jour, on n’a pas de terrain qui puisse correspondre à ce projet. On est en relation avec l’OPH de l’Ariège et Ariège assistance sur un projet un peu plus innovant donc. Un projet qui allierait à la fois des personnes avec un trouble du neurodéveloppement et des personnes âgées, de manière à travailler ce côté intergénérationnel. Avec ce nouveau projet, on est à la fois dans l’inclusion, la solidarité, la pair-aidance, le partage… Maintenant, reste à trouver un terrain.
Il nous faudrait entre 1500 et 2000 m2 ou un bâtiment à réhabiliter de 600 ou 700 m2. La spécificité, c’est que chaque locataire choisit ses intervenants, les activités auxquelles il veut participer. Donc, il garde toute son autonomie. Les personnes âgées comme les personnes avec TSA ont tout à y gagner.
Cinq logements de type 2 pour des personnes avec des troubles du neurodéveloppement et cinq pour des personnes âgées. Les personnes pourront vivre de manière autonome et il y aura un local partagé où vont se gérer des animations, des rencontres, aussi bien en interne que tournés vers l’extérieur. Tout cela est sous tendu par un vrai projet de vie social et partagé.
Ah oui, ce serait bien ça !
Le numéro de téléphone pour nous joindre est le 06.73.70.36.52.
